dimanche 24 avril 2016

Fièvre résurrectionnelle

Comme le dit le vieil adage : quand les chevaux sentent l'écurie, ils piaffent d'impatience (quand c'est le cavalier qui "sent" l'écurie, il vaut mieux prendre ses distances, mais "foin" de digression, et puis chacun ses goûts).

Alors voilà, here we are ! Alleluiah mes soeurs ! L'avènement du Messie est enfin arrivé ! Celui qui nous vient tout droit de l'autre pays du fromage (ça va nous faire un bon polder...heuh, bol d'air, désolée) ou de cet autre plat pays (qui n'est pas le mien) a été élu par la volonté du peuple et sans la force des baillonettes (ça c'est pour plus tard), juste à temps pour nous prémunir de la fin du monde (cons de Mayas) et nous sauver des flammes de l'enfer (qui est exothermique, comme chacun le sait).

Hauts les coeurs, le monde nous appartient désormais ! (juste quelques délais de livraison à prévoir, le temps de trouver le bon emballage). Promis, tel l'élixir du bon docteur, IL guérira nos maux, rendra la parole aux muets, fera pousser des jambes aux cul-de-jattes, et concoctera des programmes de télé intelligents (enfin pour ça il n'avait rien promis, à l'impossible nul n'est tenu).

En vérité je vous le dis, Mesdames, Messieurs (les demoiselles n'ont qu'à aller se faire voir, elles qui n'ont plus droit de cité), c'est une ère nouvelle qui s'offre à nous, la lutte finale en technicolor et en 3D (à condition d'avoir les bonnes lunettes), le "rester groupir" et demain, oui demain, demain on rasera gratis et des rivières couleront des torrents de miel.

Le seul hic dans tout ça, c'est que, habitués que nous étions à ce qu'on nous serve le brouet infâme qui nous tenait lieu de soupe depuis des lustres, nous en avions fini par oublier le goût véritable du velouté de champignons, et certains de se précipiter dans le Doubs* pour en cueillir à foison, le coeur léger et des colliers de fleurs dans les cheveux.

C'est ainsi que, devant cet immense espoir où tout semble permis désormais, on assiste à des revendications tous azimuths, qui vont de l'obtention du mariage pour tous à la suppression de la mention "sexe" sur la carte d'identité, sans parler de choses encore plus farfelues. Je m'explique :

-sur le droit au mariage pour tous, aucun problème, et en plus ça m'arrange, puisque selon ce qu'il m'a été dit de la part de certains psys, le fait que je sois déjà mariée m'empêcherait d'être opérée en France, car ça me conduirait dans une impasse juridique, puisque mon état civil ne pourrait pas être modifié par la suite. Il vaut mieux en effet que je reste avec un sexe qui ne me correspond pas plutôt que sur mes papiers d'identité figure le nom de "Mr."...après tout, il est vrai qu'on est amenée à présenter ses papiers plus souvent que de se voir dans le miroir de la salle de bains. On disait que les français étaient sales, je n'imaginais pas que c'était à ce point là. Blague dans le coin, je dirais que pour mon cas, le changement d'état civil est important, mais pas autant que d'être en adéquation physique avec ce que je suis au fond de moi. En d'autres termes, l'opération de réassignation sexuelle n'a jamais été une option pour moi mais était partie intégrante de tout le processus...ou alors il faut être logique : je ne suis pas vraiment transsexuelle dans l'âme et il faut vite me virer des listes des bénéficiaires de l'ALD 31, la sécu n'a pas besoin de faux malades pour creuser son trou béant.

Je sais que certaines trans ne désirent pas cette opération ou ne peuvent tout simplement pas y avoir accès pour raisons médicales, je ne suis pas là pour juger de ça, je dis juste que dans mon cas cette opération est vitale. Après, que je mette des mois pour obtenir un hypothétique changement d'état civil (ce n'est pas déjà le cas de toutes façons ?), ça me regarde et je m'en accommoderai au pire.

-sur la demande de remplacer le terme d'identité sexuelle par le terme d'identité de genre, à propos de la nouvelle loi sur les discriminations, là j'avoue en revanche que c'est chipoter un peu. L'identité sexuelle dont il est question ici correspond à l'identité "sexuée" en quelque sorte, peu importe ce que vous avez entre les jambes ou pas. Tout celà vient à la base d'une mauvaise traduction de "gender" qu'on a transformé en "genre" alors que l'idée du "gender" anglo-saxon est bien le "sexe social", avec les codes correspondants. Prenons un exemple. Robert, qui est né garçon, décide un jour d'adopter les comportements et les codes vestimentaires du sexe opposé (tiens), que ce soit de façon définitive, temporaire ou partielle, et peu importe qu'il soit travestie, transgenre ou transsexuelle. Dans la plupart des cas, pour ne pas dire à chaque fois, tant que Robert est identifié comme appartenant au beau sexe (tiens tiens) et qu'il fera tout pour être en adéquation avec ledit, il aura au minimum opté pour Roberta, bref, il sera identifié comme étant du sexe féminin (à moins qu'il décide de relever sa jupe et d'exposer son service 3 pièces aux gens de la rue, pour le cas où il l'aurait encore à sa disposition). Ben franchement, je n'ai jamais vu de gens présentant toutes les caractéristiques d'une fille clamer haut et fort qu'il faut qu'on l'appelle Robert en lieu et place de Roberta ou conserver une barbe de 15 jours tout en étant vétu d'un tutu rose, que ce soient des travesti(e)s, des transgenres, ou des transsexuelles. Pendant la période où l'on se sent Roberta, on fait tout pour le rester. On s'identifie bien à un "sexe social" et pas autre chose.

Après, que Robert...pardon, Roberta, veuille adopter un mauvais genre ou être bon chic, bon genre, c'est une autre histoire. Une fille peut avoir le genre qu'elle veut, de la secrétaire de direction à la wesh-wesh de cité (la conne), elle restera une fille aux yeux des gens (quoique pour la wesh-wesh, j'ai du mal). C'est pareil pour Roberta tant qu'elle reste Roberta. Et puis si on ne peut plus se moquer des wesh-wesh sans aussitôt être taxée de transphobe, où va-t'on ?

-sur une demande qui circule en ce moment pour faire supprimer la mention du sexe à l'état civil, là aussi je trouve ça très con, car si on reprend l'exemple de Robert, qui sonne tout de même comme un prénom masculin, c'est à dire un prénom qu'on réserve plutôt à ceux qui naissent avec un pendule entre les jambes, on aura beau supprimer tout ce qu'on veut, Robert ne sera jamais égal à Roberta et son prénom sera plutôt accolé à "Mr." qu'à "Mme", même si ça ressort d'un conformisme qui nous ramène aux heures les plus sombres de notre histoire. Parce qu'au bout d'un moment, il faut tout de même songer à conserver quelques repères, sans pour autant verser dans le fascisme le plus dur. Surtout qu'en cas de changement d'état civil pour une transsexuelle, la mention "sexe" est également modifiée, ou ça n'aurait aucun sens, faut être logique.

Pour conclure (et parce que vous avez sûrement autre chose à faire), je dirais que nous venons de connaître une grande avancée avec la loi 225-1 du Code Pénal qui reconnaît les discrimination liées à l'identité sexuelle, car elle peut tout aussi bien convenir aux travesti(e)s, qui sont femmes à temps partiel, aux transgenres, qui sont femmes à mi-temps, et aux transsexuelles, qui ont vocation à être femmes à temps plein, si vous me permettez cette analogie.

*Le Doubs est une région où l'on trouve des champignons hallucinogènes en abondance, mais chut.

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